07 02 2017

Acquisition : Projet d’aménagement de l’esplanade et de l’Hôtel des Invalides par Alphonse Crépinet

Le musée de l’Armée vient d’acquérir auprès de la librairie Cambon quatre dessins relatifs à l’Hôtel des Invalides montrant plusieurs aspects de l’histoire du bâtiment au XIXe siècle [1]. Trois œuvres concernent l’église du Dôme et représentent une vue générale de l’intérieur de l’église vers 1842-1844 par Louis-Tullius Visconti (1791-1853), un projet de verrière pour la croisée au-dessus de la porte d’entrée ainsi qu’une vue de la chapelle Saint-Augustin avec le tombeau de Joseph Napoléon Bonaparte, attribués à Alphonse-Nicolas Crépinet (1826-1892). La quatrième œuvre, signée Crépinet, est un plan général d’aménagement de l’esplanade et de l’Hôtel des Invalides réalisé en 1878.

Crépinet se forme à l’école des Beaux-Arts puis auprès des architectes Louis-Tullius Visconti et Joseph Uchard (1809-1891). Il débute sa carrière au service des Bâtiments civils et, en 1852, il devient inspecteur des travaux de la réunion du Louvre et des Tuileries. Nommé architecte du tombeau de Napoléon Ier en 1859, puis des Invalides à partir de 1862, c’est sous sa direction qu’a lieu la restauration du dôme entre 1865 et 1869. Il reste l’architecte de l’église, du Dôme et du tombeau de l’empereur jusqu’en 1891.

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Crépinet s’est intéressé à trois reprises à l’aménagement des abords de l’hôtel des Invalides. En 1864, il propose un plan d’ensemble dans le cadre d’une commission d’étude sur les emplacements de Paris disponibles à la vente. À cette époque, l’architecte s’est employé à chiffrer la vente de parcelles sur l’esplanade et autour de la place Vauban. En 1870, il présente au Salon, sous le n°4978, quatre dessins constituant un « Projet de transformation de l’hôtel des Invalides et de ses abords » [2]. Enfin, en 1878, il étudie la possibilité de regrouper plusieurs administrations sur l’esplanade. La question de la concentration des services des différents ministères est en effet étudiée à l’époque par une commission au sein des Bâtiments civils et des palais nationaux. À cette occasion, son directeur prend renseignements sur le projet britannique de réunion de divers services publics en un même lieu sur les bords de la Tamise, près de Westminster et qui avait donné lieu à un concours international en 1857 dont le premier prix avait été attribué à un architecte français : Alphonse Crépinet.

Ce projet de 1878, acquis par le musée de l’Armée, montre plusieurs bâtiments administratifs entourés de douves (six bâtiments symétriques, disposés face à face par groupes de trois, séparés par deux rues et reliés entre eux par des passerelles au-dessus des rues) sur l’esplanade des Invalides, envisagée comme une place monumentale ornée de statues où pourraient se dérouler les manifestations militaires [3]. Les éléments projetés, figurés à l’encre rouge sur le plan, sont clairement identifiables : percement de deux nouvelles artères côté est, dont un boulevard reliant directement les Invalides au pont de la Concorde entraînant la destruction de l’actuel Palais Bourbon. L’architecte a prévu de reconstruire un hémicycle contre la façade nord de l’Hôtel des Invalides. Ce projet prévoit aussi l’installation des ministères de la Guerre et de la Marine dans l’Hôtel des Invalides. Les constructions du XVIIIe siècle érigées du côté sud sont supprimées à la faveur de jardins publics [4].

Le rapporteur de la commission, le député Eugène Spuller (1835-1896), présente ses conclusions à la Chambre des députés lors de la séance du 19 mai 1879 mais le projet de Crépinet est refusé en raison du coût de l’opération, de l’espace concédé aux ministères jugé trop restreint, d’autres terrains et locaux étant privilégiés pour leur installation.

Laëtitia Desserrières, assistante au Cabinet des dessins, des estampes et de la Photographie

[1] Nous remercions M. Alexandre Gady, qui nous a signalé ces dessins. Paris, musée de l’Armée, inv. 2016.8.1 à 2016.8.4.
[2] Si les plans ne nous sont pas connus, nous en avons le descriptif dans un rapport que Crépinet rédige le 10 mars 1870, conservé à Pierrefitte-sur-Seine, aux archives nationales de France (AnF), F/21/6001.
[3] La description des constructions prévues sur l’esplanade est précisée dans un rapport que l’inspecteur des Bâtiments civils et des palais nationaux soumet au ministre des Travaux publics le 27 janvier 1879. AnF, F/21/922.
[4] Ces suppressions avaient déjà été envisagées par l’architecte dans son projet de 1864 comme l’atteste un plan conservé à Charenton-le-Pont, à la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine, inv. 04R03642.

Photo © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais/Emilie Cambier