01 06 2017

La restauration d’une pièce rare : une grenade à fusil du XVIIIe siècle

Les collections d’un musée consacré aux armes peuvent réserver de désagréables surprises. Le cas s’est présenté il y a quelques années, lorsqu’une inspection des spécialistes de la Sécurité Civile avait révélé qu’une grenade à fusil datant du XVIIIe siècle, conservée dans une réserve sécurisée, était toujours porteuse de sa charge explosive. Celle-ci, composée de poudre noire ancienne, ne présentait pas de risque majeur mais nécessitait néanmoins une intervention.

Ce type de grenade destinée à être propulsée par un « fusil-obusier », était utilisé notamment pour la guerre de siège et fonctionnait comme les obus d’artillerie de l’époque. Au départ du coup, la charge propulsive contenue dans le canon du fusil-obusier expulsait la grenade et mettait le feu à la poudre contenue dans le tube de bois qui rejoint la grenade à travers le sabot en bois, lui aussi. Cette poudre se consumait dans le tube durant le vol du projectile. Après quelques secondes, la flamme atteignait la sphère contenant la charge de la grenade et provoquait son explosion.

Fusil lance grenade ou fusil obusier, France, 1747

Fusil lance grenade ou fusil obusier, France, 1747

Grenade à fusil explosée, XVIIIe siècle

Grenade à fusil explosée, XVIIIe siècle

Un exemplaire de ces grenades, rares, était déjà présenté dans les salles, sans risque puisqu’il avait déjà explosé. Le second exemplaire, chargé, était, quant à lui, muni d’une bonnette de toile collée destinée à solidariser l’ensemble sphère/tube métallique et le sabot de bois, détail tout à fait exceptionnel. Malheureusement, la neutralisation de l’engin a détérioré la partie textile de l’objet qui, pour d’évidentes raison de sécurité, n’a pu faire l’objet d’un démontage « scientifique ».

Grenade à fusil avant restauration

Grenade à fusil avant restauration

Après cette neutralisation, Isabelle Grisolia, restauratrice textile au musée de l’Armée a donc entamé une restauration qui s’est avérée complexe. Le textile qui permet de maintenir ensemble les pièces de bois et de métal de la grenade, vient en effet s’enrouler en spirale autour de l’objet auquel il est maintenu par un lien serré sur le bois. Un deuxième lien, aujourd’hui disparu, resserrait la partie supérieure. La difficulté de la restauration venait de la fragilité du textile mais aussi de son montage en spirale, enfin du fait qu’il fallait intervenir sans procéder au démontage. C’est donc une crêpeline de soie, préalablement teinte, placée au revers du tissu et maintenue par des points de restauration, qui a permis sa consolidation. Pour restituer à la grenade son aspect initial, une pièce de coton a été introduite dans la partie supérieure et pour protéger l’ensemble une seconde crêpeline est venue recouvrir le textile. L’objet a  désormais rejoint les salles du département moderne, où il est exposé dans la vitrine consacrée à la guerre de siège au XVIIIe siècle.

Grenade à fusil après restauration

Grenade à fusil après restauration

Isabelle Grisolia, Dominique Prévôt