13 12 2017

Sainte Barbe, l’histoire d’un coup de foudre

Tous les ans depuis 2004, le musée de l’Armée fête la Sainte Barbe avec le concours des artilleurs des Ecoles Militaires de Draguignan et des régiments d’artillerie, ainsi que des associations spécialisées dans la reconstitution historique. Le musée organise une présentation dynamique de matériels d’artillerie, mis en batterie par des servants en costumes d’époque. Une manifestation qui prend place dans le cadre des cérémonies traditionnelles militaires autour du 4 décembre, date de la Sainte Barbe.

Une sainte populaire

Plusieurs légendes existent au sujet de Barbe, ou Barbara, jeune femme ayant vécu entre la fin du IIIe et le début du IVe siècle ap. J.-C., en Asie Mineure. Son culte est attesté dès le Ve siècle ap. J.-C. en Orient. Le récit de sa vie et de son martyre dans la Légende dorée, publiée au XIIIe siècle par Jacques de Voragine, contribue grandement à la diffusion de son culte, qui prend une nouvelle ampleur à la fin du Moyen Âge. La légende de sainte Barbe est alors très populaire, elle inspire de nombreux artistes et devient un thème récurrent pour les Mystères[1].

Barbe est la fille unique de Dioscore, un riche notable[2] païen de Nicomédie[3]. Secrètement habitée par la foi, elle repousse les demandes en mariage qui lui sont adressées. Son père, en raison de sa grande beauté, décide alors de l’enfermer dans une tour. Lors de son absence, Barbe embrasse pleinement la foi catholique. Une conversion qui l’amène à faire percer une troisième fenêtre à la tour, qui n’en compte que deux, en l’honneur de la Trinité. Fou de rage en apprenant cela à son retour, son père la livre au juge qui la condamne à mort. Barbe subit de nombreux supplices avant d’être décapitée par son propre père, qui meurt foudroyé juste après l’avoir exécutée.

Cette référence à la foudre, et par extension au feu et aux explosions, a fait d’elle la sainte patronne des artilleurs mais également des sapeurs, des mineurs, des armuriers, des artificiers, des pompiers et plus généralement de tous ceux qui courent le risque d’une mort subite.

Sainte Barbe au musée

Sainte Barbe peut être représentée avec différents attributs : une couronne, une tour à trois fenêtres, une palme, un ciboire et parfois des plumes de paon[4]. On peut également retrouver près d’elle un petit chien blanc, symbole de la fidélité à sa foi.

Le musée de l’Armée conserve une très belle représentation de la sainte au sein de ses collections. En effet, le plastron d’une armure milanaise datant du XVIe siècle[5], exposée dans les salles Armes et armures anciennes, porte un décor gravé et doré présentant trois saintes : sainte Marguerite, la Sainte Vierge et sainte Barbe. Cette dernière, tout à fait à droite, se tient debout, devant une tour, un ciboire surmonté d’une hostie dans les mains. Deux hypothèses peuvent être avancées : soit le commanditaire a une dévotion particulière pour ces saintes, soit il s’agit des saintes patronnes de la famille de celui-ci.

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Une tradition militaire

Dès le Moyen Âge, les corporations de métiers et les confréries se placent sous la protection d’un saint patron ou d’une sainte patronne, qu’ils célèbrent par le biais de fêtes et de messes à une date anniversaire annuelle.

Ainsi, tous les 4 décembre, les artilleurs fêtent la Sainte Barbe. Une cérémonie militaire est organisée dans chaque détachement autonome quelle soit son importance. Au programme des festivités, la célébration d’une messe, une montée des couleurs et/ou une prise d’armes, des challenges de sports collectifs et un repas de cohésion.

Le tout ponctué par le fameux cri des artilleurs :

« Et par Sainte-Barbe… Vive la bombarde ! »

Cyrielle Daehn
Assistante de conservation, département Artillerie

[1] Genre théâtral très populaire, apparu au XVe siècle, dont les sujets étaient empruntés à l’Ancien Testament et au Nouveau Testament, ou à la vie des Saints.
[2] Selon certaines sources, il s’agit en fait du roi de Nicomédie.
[3] Actuelle ville d’Izmit en Turquie.
[4] Cet attribut fait référence à l’un de ses supplices. Alors qu’elle devait être fouettée, le fouet se transforma en plumes de paon.
[5] Armure G8 au catalogue Robert.

Photo © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Emilie Cambier