La Bibliothèque a acquis en vente publique, le 23 octobre 2012 (étude Audap-Mirabaud), trois ouvrages rares et de référence, qui viennent enrichir ses fonds précieux, dans un de ses pôles d’excellence. Ils apportent en effet un éclairage très complet, parfois étonnant, sur les techniques de l’artillerie et du génie dans les premières décennies du XVIIe siècle. C’est pour le musée de l’Armée, dont les collections d’artillerie sont parmi les plus riches, l’opportunité de compléter ses connaissances dans ce domaine.
Les deux premiers ouvrages [1] sont l’œuvre de Jean Appier, dit Hanzelet (1596-1647). Fils de Jean Appier, ingénieur des ducs de Lorraine, Hanzelet (« petit Jean », pour le distinguer de son père) est parfois qualifié de brillant « touche à tout ». Initié aux mathématiques, à la pyrotechnie et la physique par son père, il est, jusqu’en 1628, imprimeur juré à Pont-à-Mousson, qui abritait alors une importante université, et graveur. Vers 1626, il est nommé par le duc Charles IV de Lorraine « Maistre des feux artificiels », c’est-à-dire ingénieur des poudres et directeur de l’artillerie en Lorraine. La Pyrotechnie, paru en 1630, est en réalité une refonte du Recueil de plusieurs machines militaires…, publié en collaboration avec le maître chirurgien François Thybourel. La 1ère édition, (Pont-à-Mousson, 1620) est illustrée de 101 vignettes gravées dont 50 signées A. Hanzelet. La seconde, sous la seule plume de Jean Appier Hanzelet, contient 133 figures, provenant en grande partie de l’édition de 1620.
Le troisième ouvrage est de François Malthus [2] ( ?-1658) gentilhomme anglais, qui avait servi aux Pays-Bas et que le roi Louis XIII avait nommé commissaire général des feux et artifices de l’artillerie de France et ingénieur de ses armées. Il est divisé en cinq parties et illustré de belles gravures en pleine page.
Les trois titres ont en commun de décrire, parfois avec beaucoup d’inventivité pour Hanzelet, plus classiquement pour Malthus, les moyens d’attaque et de défense et s’achèvent sur un long chapitre consacré aux « feux de joye ». Ces feux de joie, largement évoqués, deviennent, dès le début de XVIIe siècle, un thème très en vogue : les ingénieurs militaires utilisaient leurs compétences d’artificiers à la guerre mais en faisaient aussi un usage plus festif, en organisant de somptueux feux d’artifices. Hanzelet est ainsi le premier auteur à lier guerre et fête dans un manuel militaire en langue française. Il ouvre la voie aux travaux d’auteurs comme Malthus, qui consacre une place importante au feu de récréation et à la composition scénographique. On s’éloigne là du strict manuel militaire, mais c’est aussi ce qui fait l’originalité et la richesse de ces ouvrages.
Michèle Mezenge, chargée d’Etudes Documentaires.
[1] THYBOUREL François et APPIER Jean, dit HANZELET. Recueil de plusieurs machines militaires, et feux artificiels pour la guerre, et recréation… Pont-à-Mousson, par Charles Marchant., 1620.
APPIER Jean, dit HANZELET. La Pyrotechnie de Hanzelet, Lorrain. où sont representez les plus rares et plus appreuvez secrets des machines et des feux artificiels propres pour assieger, battre, surprendre et deffendre toutes places. Pont-à-Mousson : I. et G. Bernard, 1630.
[2] MALTHUS François. Pratique de la guerre, contenant l’usage de l’artillerie, bombes et mortiers, feux artificiels et pétards, sappes et mines, ponts et pontons, tranchées et travaux, avec l’ordre des assauts aux brèches et à la fin les feux de joye… Paris : I. Guillemot, 1646.
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