Peintre et dessinateur, petit-fils de Victor Hugo, Georges Victor-Hugo (1868-1925) est aussi écrivain. Après un engagement de trois ans dans la marine, il publie ses Souvenirs d’un matelot en 1896, puis, en 1902, Mon grand-père [1]. Dessinateur, il a réalisé lors de la Première Guerre mondiale, un ensemble de dessins dont certains sont présentés actuellement dans l’exposition Vu du front. Représenter la Grande Guerre.
La Grande Guerre de Georges Victor-Hugo débute en 1915. Affecté dans un premier temps à la censure à Paris, puis comme agent de liaison au 171e régiment d’Infanterie, on le trouve dans la région du Bois des Chevaliers dans les Hauts-de-Meuse, puis en Champagne au moment de l’offensive de septembre 1915. Il participe aux combats autour de la ferme Navarin, et obtient une citation à cette occasion mais est contraint de quitter le front pour raisons de santé en 1916.
En 1916, l’artiste Sem publie un article sur les croquis de guerre réalisés par Georges Victor-Hugo en Champagne en 1915-1916 dans le journal L’Illustration [2]. Témoignant du quotidien des combattants, ces dessins sont réalisés avec les matériaux trouvés dans les tranchées. Georges Victor-Hugo raconte lui-même la fabrication d’un dessin : « je le coloriais légèrement avec ce que j’avais sous la main. Un peu de jus de tabac et une goutte de café sucré, cela fait une sépia épatante ; avec un peu de pinard on fait du sang magnifique, et, pour obtenir le terrain, le ton général du paysage, ce ton blanchâtre de la Champagne, je délayais un peu de la craie attachée à ma capote… et voilà ![3] »
Le musée de l’Armée conserve dans ses collections vingt-sept de ces croquis de guerre qui, d’un trait rapide, saisissent le tumulte au moment des assauts comme dans la Sortie de tranchée pour l’attaque [4].
Les soldats représentés dans leurs activités quotidiennes, sont l’objet de plusieurs représentations à l’instar du Guetteur dans une tranchée [5].
Le retour de Georges Victor-Hugo à la vie civile est décrit pas son fils Jean : « Nommé sous-lieutenant honoraire, il se fit faire un képi remarquable, à ample fond de drap garance, le képi du colonel Ramollot, mais à un seul galon. En tenue bleu horizon, sa croix de guerre sur la poitrine et appuyé sur son bâton d’épine du bois des Chevaliers qu’il avait orné d’insignes allemands ramassés après les combats de septembre, il revint, d’assez mauvaise humeur, s’asseoir à la terrasse du café des Gaufres, aux Champs-Elysées. [6] »
L’artiste s’emploie alors à faire connaître ses dessins de guerre qui sont exposés en 1917 au musée des Arts décoratifs à Paris. Un album de fac-similés en couleurs est publié à cette occasion, sous le titre 100 croquis de guerre. Front de Champagne 1915-1916. L’Etat se porte acquéreur de neuf dessins de l’artiste à l’issue de l’exposition [7].
Georges Victor-Hugo retourne une dernière fois sur le front à Noyon en mai 1917, reconnu comme artiste, chargé d’une mission artistique aux armées confiée par le sous-secrétariat d’Etat des Beaux-Arts.
Laëtitia Desserrières, assistante au département Iconographie
[1] Cette même année, un décret lui accorde le droit de porter le nom de « Victor-Hugo » : bibliothèque de la Maison de Victor Hugo, Décret daté de 1902 : « Le Sieur Hugo (Georges, Charles, Victor, Léopold), […] est autorisé à faire précéder son nom patronymique de celui de « Victor » et à s’appeler légalement à l’avenir « Victor-Hugo » au lieu de « Hugo ».
[2] Sem, « Un artiste inconnu », L’Illustration, numéro de Noël (3850), 16 décembre 1916.
[3] Ibid.
[4] Paris, musée de l’Armée. Inv. 19365/26 ; Eb 999.
[5] Paris, musée de l’Armée. Inv. 19365/1 ; Eb 981.
[6] Jean Hugo (1894-1984), Le Regard de la mémoire, Le Paradou, Acte Sud, 1983, p. 170. Pendant la guerre, Jean Hugo combat au 36e régiment d’Infanterie avant d’occuper une place d’interprète auprès de l’armée américaine à partir de 1917.
[7] Ces dessins sont aujourd’hui conservés à la Bibliothèque de Documentation Internationale contemporaine (BDIC) – Musée d’Histoire contemporaine.