Les collections du département moderne viennent de s’enrichir d’un objet d’une typologie un peu particulière, un collier de chien. Comme l’indique une inscription gravée sur ce collier, il était destiné à un chien ayant appartenu au baron Maurice de Helldorf (1748- ?), capitaine au régiment de cavalerie Royal-Allemand.
Cet imposant collier de 14 cm de diamètre est fait de deux pièces de laiton reliées par une charnière et fermant, à l’origine, par une pièce mobile formant boucle. Il est souligné par une bordure ourlée dessinant un cadre que longe une ligne de trous laissant penser que la pièce était doublée d’une bande de cuir ou de tissu. L’une des pièces est gravée de l’inscription : J’appartiens à Mr le baron de Helldorf rue du Jardinet – Capitaine de Royal Almand Cavalerie et porte les armoiries d’alliance des familles de Helldorf et de Creil. L’autre pièce porte un fort piton de fer forgé servant d’accroche à la laisse.
La famille de Helldorf fait partie de la haute noblesse saxonne. Charles Auguste ( ?- ?) de Helldorf, père de Maurice, est capitaine d’une des compagnies du régiment de Saxe dans les années 1740. Proche de Maurice de Saxe (1696-1750), il porte le cœur du maréchal lors de ses funérailles. Maurice se forme au métier des armes lors de son passage dans la deuxième compagnie des Mousquetaires, compagnie à laquelle il appartient encore en 1764, lorsqu’il épouse Louise-Félicité Emilie de Creil ( ?- ?). La présence du chevalier de Helldorf est par la suite attestée au sein du régiment Royal-Allemand en 1772.
Le musée de l’Armée conserve déjà un collier de cette nature (Inv. 5831) mais il est très lacunaire et la personnalité de l’officier dont le nom est gravé dessus, monsieur de Chenelette, est encore imprécise.
Un dernier exemplaire comparable est conservé au musée de la Chasse et de la Nature. Le chien qui le portait appartenait à M. de Martigny, aide-major au régiment de cavalerie de Penthièvre entre 1766 et 1771. La proximité chronologique ainsi que la similitude formelle de ces objets semblent suggérer une pratique, chez certains officiers, consistant à faire de leur animal de compagnie un marqueur social indiquant leur qualité et leur niveau hiérarchique.
On ne sait malheureusement rien du chien qui a porté ce collier. Les chiens dont on s’entoure à l’époque sont de petite taille, bichon, cocker spaniel ou des chiens de taille moyenne comme les épagneuls et certaines variétés de lévriers. La taille de l’objet évoque un chien de forte carrure, du type dogue qui est, lui, plus souvent utilisé pour la chasse, un usage qu’on s’explique mal dans un contexte citadin, la rue du Jardinet se situant dans l’actuel sixième arrondissement de Paris.
Cet objet, témoignant du mode de vie aristocratique de certains officiers contraste avec le quotidien plus austère de la troupe. II fait aussi écho à d’autres objets des collections du musée de l’armée : le tableau Soldats d’infanterie au camp de Châlons peint en 1864 par Alexandre Eugène Bellangé, la Valiant dog decoration décernée à Bacchus mascotte du sous-marin le Rubis, concourant ainsi à retracer les relations entre monde militaire et monde animal sur le temps long.
Dominique Prévôt, C.E.D., Département Moderne